Quand Besançon se transforme en vitrine du cinéma africain grâce à Lumières d’Afrique

 Quand Besançon se transforme en vitrine du cinéma africain grâce à Lumières d’Afrique

Le seul festival de cinéma dans la ville de naissance des frères Lumière est consacré au continent africain. 

La 21e édition du festival Lumières d’Afrique a démarré le 6 novembre à Besançon. Depuis 1996, les Bisontins peuvent découvrir le temps d’une semaine la production cinématographique liée au continent. La pandémie du Covid-19 continue de peser sur l’événement qui n’a pas pu se tenir en 2020 et qui revient, cette année, sans compétition. Plus d’une trentaine de films inédits sont à voir jusqu’au 14 novembre, des films labellisés en 2020 et d’autres sortis en 2021, comme La Femme du fossoyeurEtalon d’or du Yennenga au dernier Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), Feathers ou encore L’Indomptable feu du printemps qui sont respectivement repartis avec le Tanit d’or et le Tanit d’argent à la dernière édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC)Entretien avec Gérard Marion, le fondateur et directeur du festival. 

franceinfo Afrique : Comment Besançon est devenue une ville où l’on promeut le cinéma africain ?

Gérard Marion : Dans tout projet, il y a une démarche personnelle. J’ai eu la chance de vivre au Cameroun pendant trois ans durant mon service militaire. Quand je suis rentré en France, je voyais beaucoup d’associations et d’ONG qui étaient en lien avec le continent africain. Nous avons ainsi créé un collectif qui s’appelait Négritude, parce que nos amis des Antilles voulaient être avec nous. Les associations construisaient souvent des ponts et des écoles, mais la notion culturelle était très peu présente. C’était aussi une époque nourrie par le livre de René Dumont, L’Afrique noire est mal partie (1962), alors qu’il y avait des projets positifs. C’était important que l’on puisse ouvrir nos esprits à la création sur le continent. Nous nous sommes alors dit pourquoi pas un festival dans la ville natale des frères Lumière autour des cinémas d’Afrique. Nous avons donc créé ce festival en 1996, à la fois pour militer, pour montrer ce qu’il s’y passait et avoir une ouverture sur le continent. Il y a eu une autre édition en 1999 et elle est annuelle depuis 2003. 

Gérard Marion, fondateur et directeur du festival Lumières d'Afrique, qui se tient chaque année à Besançon.   (BERTAND VINSU)
Gérard Marion, fondateur et directeur du festival Lumières d’Afrique, qui se tient chaque année à Besançon.   (BERTAND VINSU)

D’où viennent ces films africains qui sont projetés à Lumières d’Afrique ? Comment sont-ils repérés ?

C’est un grand secret (rires) ! Il y a d’abord l’appel à projets, comme dans tous les festivals. Il se fait à partir du mois de mars. Les réalisateurs et les producteurs nous envoient leurs projets. Ensuite, nous identifions des films dans d’autres festivals. Nous disposons de plusieurs comités de sélection. Entre en compétition dans la catégorie des longs métrages de fiction, un film produit il y a moins de deux ans, réalisé sur le continent par un réalisateur du continent. Pour le documentaire, il doit également être produit il y a moins de deux ans, porter sur un sujet qui touche l’Afrique et évidemment y être tourné. Pour les courts métrages de fiction, c’est la même règle que les longs. Nous avons également des transversales où l’on retrouve des films réalisés en France ou ailleurs qui parlent du continent africain comme, il y a quelques années, Camille de Boris Lojkine. 

Les Bisontins sont-ils au rendez-vous ?

Ce sont 8 000 personnes qui participent au festival. Au départ, c’était des militants associatifs ou des personnes qui avaient un lien avec l’Afrique. Mais depuis, Lumières d’Afrique est devenu un lieu de culture, de cinéphilie, d’ouverture et d’échanges. C’est aussi un rendez-vous festif où les gens ont plaisir à se retrouver et à parler des films. Quand il y a la compétition, les pronostics vont bon train. Cette année, il n’y en a pas, mais les gens sont très curieux. Il était important qu’on retrouve à Besançon En route pour le milliard de Dieudo Hamadi, labellisé Cannes 2020 et Lumières d’Afrique 2020. Tout comme Le Père de Nafi (Baamun Nafi), labellisé également Lumières d’Afrique 2020, que j’ai découvert au festival de Marrakech en 2019. La programmation propose également des films de réalisateurs bisontins. Ce sont des petites pépites que nous avons repérées cette année. A savoir Petits princes, qui est un travail expérimental fait par des mineurs non accompagnés. Le deuxième, A fon de Cirk, est la restitution d’un échange avec une association bisontine qui est allée au Bénin faire une formation sur le cirque. Le troisième, Mémoire d’appelé, est celui de Thibaut Garcia, un étudiant en cinéma de 23 ans qui a produit un superbe travail sur son grand-père qui a fait la guerre d’Algérie. 

Les professionnels africains répondent-ils présents quand vous les sollicitez ?

Ils répondent toujours présents ! A l’instar de Narcisse Wandji qui signe Bendskins. C’est important et normal que l’on retrouve son premier long métrage de fiction dans la sélection de Besançon. Le film se déroule au Cameroun et s’intéresse aux motos taxis. La manière dont il aborde leur vie et leur quotidien, en faisant des clins d’oeil cinéphiles notables, est assez impressionnant. 

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